L’abri souverain d’Auguste Perret, architecte entrepreneur
Le palais d’Iéna, à Paris, fête ses 80 ans à travers des conférences, des débats ou encore des films autour de l’architecture de demain... L’occasion de redécouvrir ce formidable bâtiment.
1939-2019 : depuis quatre-vingts ans, le palais d’Iéna dresse ses façades dépouillées et verticales à deux pas de la place du Trocadéro. Ce “temple” de l’architecture moderniste et du béton armé est, d’après de nombreux spécialistes, le chef-d’œuvre et l’aboutissement des recherches de l’architecte Auguste Perret. Fils d’un entrepreneur en bâtiment français, immigré en Belgique au XIXe siècle, Auguste Perret naît à Ixelles, en 1874, aîné de deux frères qui s’engageront comme lui dans l’entreprise de maçonnerie familiale. Il se passionne pour l’architecture et intègre l’École des Beaux- Arts de Paris. Sans être la première à employer le béton pour réaliser des immeubles ou des bâtiments industriels ou commerciaux, l’entreprise des frères Perret s’illustre dès le tournant du XXe siècle, par une utilisation optimale du matériau.
Formes, audaces, simplicité et portées des poteaux-poutres en béton armé, tel semble le leitmotiv d’Auguste Perret. Après le coup de maître du théâtre des Champs-Élysées, édifié sur une parcelle étriquée, l’architecte pousse avec le palais d’Iena son épure et son système constructif en béton armé au maximum de ses possibilités des années 30.
Le béton armé, matériau de l’épure
Le bâtiment, commencé en 1937, s’inscrit sur une parcelle triangulaire d'une forte déclivité (plus de 4 mètres entre les cotes extrêmes), en contrebas de la place du Trocadéro. Bâtiment public, il devait abriter le musée permanent des Travaux publics. La commande faite à Auguste Perret comprend de vastes salles d’exposition, des bureaux, des remises et une salle de conférences de plusieurs centaines de places... Le parti pris de l’architecte consiste en un système de poteaux-poutres (8 mètres de développement dans la salle hypostyle) avec un canevas régulier pour les deux ailes du bâtiment. Les colonnes, très fines, sont évasées et terminées en chapiteaux discrets – à la manière égyptienne et « comme des troncs de palmiers », écrira l'architecte –, et se fondent dans l’architrave.
Ce qu’a introduit Auguste Perret par cette construction (en partie réalisée), c’est l’utilisation du béton armé à la fois comme structure et décor. L'architecte joue aussi des couleurs infinies que permet le béton par le choix et la provenance des granulats, comme le porphyre ou le marbre.
Au-delà de la salle hypostyle, aussi monumentale que la nef d’une église, l’escalier est l’autre morceau de bravoure d’Auguste Perret. Il semble flotter dans l’espace malgré le matériau rugueux et sa masse imposante. Enfin, l’amphithéâtre est abrité sous une coupole invraisemblable par ses proportions, éclairée par des pavés de verre sommitaux. Elle répond peut-être à l’un des premiers monuments emblématiques de l’art de la construction, le Panthéon, telle une tholos revisitée des temps modernes.
Pour célébrer ses 80 ans, le palais d’Iéna, qui abrite à présent le Conseil économique, social et environnemental (Cese), organise plusieurs rencontres, visites et conférences, et accueillera plus de 300 jeunes étudiants, apprentis et lycéens.
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